Bruxelles, 4 septembre 2024
Les Nations unies sont parvenues à un accord sur le projet de Convention contre la cybercriminalité. Publié après l’approbation du comité ad hoc des Nations unies à New York en août, le projet de convention devrait être adopté par l’Assemblée générale des Nations unies dans le courant de l’année.
Toutefois, l’adoption de ce nouveau traité semble aller à l’encontre des progrès réalisés dans la lutte contre les contenus pédopornographiques au niveau européen, car il laisse la porte ouverte à l’utilisation de l’intelligence artificielle dans la création de contenus abusifs. Alors qu’une grande partie du contenu général se concentre à juste titre sur la cybercriminalité, il ne semble pas que la pornographie soit prise en compte dans son champ d’application. Malheureusement, le projet de document est considérablement affaibli par un article important.
Le texte donne la possibilité d’autoriser l’utilisation de matériel pornographique lorsqu’il y a « consentement » de l’enfant et qu’il est généré par l’IA, comme le prévoit l’article 14.4 de ce projet de convention des Nations Unies : « Conformément à leur droit interne et dans le respect des obligations internationales applicables, les États parties peuvent prendre des mesures pour exclure la criminalisation des actes suivants:
(a) le comportement des enfants à l’égard de matériel autogénéré les représentant ; ou
(b) la production, la transmission ou la possession consensuelle de matériel décrit au paragraphe 2 (a) à (c) du présent article, lorsque le comportement sous-jacent décrit est légal tel que déterminé par le droit national, et lorsque ce matériel est conservé exclusivement pour l’usage privé et consensuel des personnes impliquées ».
Vincenzo Bassi, Président de la FAFCE, a déclaré : « Il s’agit d’un périlleux pas en arrière dans la lutte internationale contre les abus sexuels et la pornographie infantile. Les institutions, les États membres et les entreprises technologiques commencent à comprendre leur devoir en matière de protection des enfants. Malheureusement, ce possible traité international comporte un énorme manque.
« L’utilisation de l’intelligence artificielle pour créer des images d’abus sexuels et de pornographie infantile met en danger les victimes et conduit à une dégénérescence morale. Nous devons tirer les leçons de la normalisation de la pornographie au cours des dernières décennies, qui a exacerbé la dépendance, la solitude et la violence sexuelle. Il est absurde d’utiliser l’argument, comme l’ont fait les auteurs de cet article, selon lequel cela favorise l’exploration sexuelle. Les enfants en bonne santé et soutenus sont le résultat de familles et de communautés qui les protègent – et non d’expérimentations dangereuses dans le Far West de l’intelligence artificielle ».
Ce projet d’accord ne reflète pas non plus de manière adéquate la clarté des engagements antérieurs des Nations unies sur cette question, tels que le protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants. L’article 1 du protocole facultatif dispose que « les États parties interdisent la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants ». Il définit la pornographie mettant en scène des enfants comme « toute représentation, par quelque moyen que ce soit, d’un enfant se livrant à des activités sexuelles explicites, réelles ou simulées, ou toute représentation des organes sexuels d’un enfant à des fins principalement sexuelles ».
L’article 3 du protocole facultatif précise que « chaque État partie veille à ce que, au minimum, les actes et activités ci-après soient pleinement couverts par son droit pénal, que ces infractions soient commises au niveau national ou transnational, par un individu ou de façon organisée ». Le protocole facultatif ne mentionne aucune exception à cette incrimination car il vise à protéger les mineurs contre toutes les formes de pornographie en ligne.
Après trois ans de négociations, le traité devrait être adopté officiellement par l’Assemblée générale des Nations unies à New York dans le courant de l’année. Il sera ouvert à la signature des États membres. Il n’entrera en vigueur que lorsque quarante pays l’auront ratifié.
La FAFCE exhorte les États membres à réfléchir davantage à la manière dont l’IA peut stimuler la cybercriminalité afin de trouver une solution pour empêcher l’utilisation de ces technologies pour la création de matériel abusif.
La Plateforme Bouclier, avec laquelle la FAFCE travaille, est engagée avec plus de 30 ONG de 19 États membres de l’UE dans une campagne pour la protection des mineurs en ligne. Lisez ici leur document de plaidoyer.